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Stop au travail gratis : je suis un pro !

La newsletter des artistes n°49 - octobre 2021

Stop au travail gratis : je suis un pro !

On vous sollicite pour jouer et vous ne savez pas comment négocier votre cachet. Vous n’arrivez pas à refuser un – énième – coup de main gratuit à un « ami » ? Voici quelques conseils pour mieux négocier !

Les artistes se retrouvent souvent dans des situations de travail informel, aux contours mal définis. Ces difficultés interviennent principalement en début de carrière, mais peuvent aussi perdurer. Les raisons peuvent être nombreuses, parce qu’on a envie de « rendre service », « de se faire connaitre », « de créer de nouvelles opportunités », « de faire plaisir » :

Passe nous voir au studio, on enregistre mon nouvel album et apporte ta guitare
On joue au Baltazar samedi soir, tu pourrais monter sur scène si ça te dit
Tu te souviens de mon ami réalisateur ? Il cherche une comédienne pour un petit rôle dans son premier film, là ils sont un peu à court de budget du coup je lui ai parlé de toi…

En clair, des propositions fort sympathiques, mais où il n’est jamais question d’argent. Comme si le « plaisir de jouer ensemble », « tu peux le faire pour moi, c’est pas grand-chose » pouvaient remplacer votre rémunération…

Positionnez-vous en professionnel

Pour en finir avec le travail gratuit, la première étape est de lister tout ce que vous ne voulez plus faire, comme par exemple :

– ne plus accepter de jouer dans des projets à moins de XXX €/jour,
– les plans gratuits c’est terminé pour moi,
– ne plus me déplacer à plus de 50 km sans négocier l’hôtel et le transport…
– ne plus m’engager si je n’ai pas signé un contrat m’assurant une rémunération si mon enregistrement est exploité.

Préparez le terrain, communiquez vos nouvelles dispositions hors contexte. Leur transmission en amont est un moyen pour vous d’énoncer vos conditions, sans qu’elles ne s’opposent à celles qui vous sont proposées.

Confortez-vous sur vos compétences

2ème étape : la légitimité. Quel artiste ne s’est pas posé la question de ses compétences et de sa légitimité à se positionner en artiste professionnel ?
S’il y a un seul conseil à retenir : ce n’est pas à vous d’évaluer votre talent, ce n’est pas votre job !
Pour parvenir à négocier, l’artiste doit se sentir légitime dans sa démarche. Or, gagner en légitimité n’est pas inné. Si on fait appel à vous, c’est que la personne qui vous fait une proposition a jugé que vous correspondiez à ses attentes.
Ne vous posez plus la question de savoir si vous êtes “bon” ou pas… On vous reconnait du talent puisque c’est vous que l’on sollicite ! Voilà un point qui devrait vous soulager !

Faites le point sur vos valeurs

Se positionner en professionnel et négocier ses rémunérations, ne signifie pas pour autant cesser tout travail gratuit mais c’est vous qui en fixez les limites. Accepter de participer à un projet caritatif qui vous tient à cœur sans contrepartie financière, accepter un bœuf entre amis pour le plaisir, c’est vous qui décidez !
Et même si les principaux bénéfices en nature les plus couramment évoqués ne sont pas négligeables : acquérir de la visibilité et de l’expérience, ces avantages doivent rentrer dans le calcul de votre négociation. Quel public sera présent, où sera diffusé mon enregistrement, quel circuit de projections est envisagé ? Toutes ces informations entrent en compte pour évaluer en retour la valeur de votre participation.

…et fixez votre valeur

En revanche, votre travail a un prix (comme tout travail d’ailleurs !).
Quand vous vous rendez chez le dentiste, son prix tient compte de sa prestation, mais également de ses années d’études, du cabinet, de son matériel… Il en est de même quand vous achetez votre baguette de pain.

Et il en est de même pour vous artiste. Vous êtes légitime à demander à être payé car vous avez beaucoup investi pour devenir l’artiste que vous êtes aujourd’hui.

Souvenez-vous du chemin parcouru depuis vos premiers pas dans le milieu : vous avez travaillé, progressé. Vous avez élargi votre réseau, accumulé des expériences. Cette évolution est le fruit de plusieurs années d’exercice, de multiples rencontres, de dizaines de projets. En clair, vous n’êtes pas un amateur, ni un bénévole. Fixez votre prix.

Abordez l’art de la négociation comme un jeu

Se sentir légitime et savoir négocier sont deux choses différentes !
Affranchissez-vous de la croyance que la négociation n’est pas à votre portée ou que ce n’est pas à vous de la mener. La négociation est un art à part entière. Vivez-la comme une expérience ludique et gratifiante à chaque étape. Acceptez le malaise et la maladresse du débutant, vous apprendrez au fur et à mesure, comme vous avez appris votre art.

Préparez-vous : analyser vos expériences antérieures (ce qui a marché / ce qui n’a pas marché) et questionnez vos pratiques : ce qui vous a mis mal à l’aise, ce qui vous a désarçonné, ce qui vous a encouragé, ce que vous avez réussi à faire passer…

Donnez votre prix en 1er : en négociation il y a l’idée que le premier qui annonce un tarif donne l’ordre de grandeur, et qu’il ne sera pas ensuite possible de négocier plus de 30 % maximum. Il est donc important pour l’artiste de donner un tarif important comme base de négociation. Il ne s’agit pas seulement d’accepter ou non un tarif proposé, il s’agit de fixer son prix.
Ne vous dévalorisez pas : ne faites jamais jouer votre situation personnelle même si elle est difficile (j’ai des factures à payer, des enfants à charge, je ne m’en sors pas…)

Identifiez vos freins

La peur : « et s’il ne me rappelait plus JAMAIS ? »
Et alors ? est-ce que vous comptez mener votre carrière sur cette seule relation ? –Bien sûr que non ! Vous allez au fil du temps élargir votre réseau et recevoir d’autres propositions. Par ailleurs, posez-vous la question : la peur peut-elle être le moteur qui guide ma carrière ?
Enfin pour ne pas froisser vos interlocuteurs, expliquez-leur les raisons qui vous poussent à refuser leur projet. Exposez-leur vos valeurs, vos exigences, vos conditions. Dites-leur que vous seriez partant mais à vos conditions.

Le compromis : « si j’accepte cette fois, ils me paieront peut-être la fois suivante ? »
En êtes-vous certain ? Avez-vous vraiment validé le fait qu’il n’y a pas de budget ?
Avez-vous vérifié les valeurs de votre interlocuteur ?
Ce n’est pas parce vous feriez tout pour payer les artistes qu’il partage ce principe avec vous. Etes-vous sûr que s’il y avait de l’argent il vous paierait ?

Le sacrifice : « ils ont besoin de moi, je ne peux pas les abandonner ! »
Attention, vous n’êtes pas responsable de tout. Les autres sont responsables de leur projet. Leur projet ne peut dépendre uniquement de votre présence, Posez-vous la question des rapports de dépendance. Est-ce que les autres peuvent construire leur histoire sans vous ? Vous n’êtes pas responsable de la vie matérielle des autres ! Ils n’ont pas à faire valoir cet argument pour vous demander de travailler gratuitement.

Bien évidemment, il ne s’agit pas de sortir d’un projet du jour au lendemain mais de se désinvestir peu à peu en annonçant clairement vos nouvelles conditions et de s’y tenir !

illustration : Antonio Giovanni Pinna

 


En savoir +

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> Consultez en libre accès les fiches pratiques sur le sujet du « contrat de travail »


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